Question et réponse écrite n° : 0939 - Législature : 54
Auteur | Georges Dallemagne, CDH (00951) |
Département | Vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé de Beliris et des Institutions culturelles fédérales |
Sous-département | Affaires étrangères et européennes |
Titre | Les droits de l'homme au Rwanda. - Révision du procès de madame Victoire Ingabire. |
Date de dépôt | 27/01/2017 |
Langue | F |
Date de délai | 03/03/2017 |
Question |
C'est en 2017 que doivent se tenir les élections présidentielles au Rwanda. On le sait, en décembre 2015, un "pseudo-référendum" a amendé la constitution pour permettre un éventuel 3ème mandat de l'actuel président Kagamé. Et pour l'ensemble des analystes, il ne fait strictement aucun doute que monsieur Kagamé remportera cette élection et se maintiendra ainsi au pouvoir pour sept années supplémentaires. Cela en dit long sur la nature autoritaire du régime rwandais et son refus d'accepter l'alternance et le pluralisme politique. Dans ce contexte, les atteintes aux libertés individuelles et en particulier à la liberté d'expression sont évidemment généralisées (par exemple, le Rwanda est classé 161ème sur 180 pays en matière de liberté de la presse). Même si en comparaison de la situation au Burundi et au Congo, la "stabilité" rwandaise peut sembler rassurante, il n'en demeure pas moins que ces atteintes aux droits de l'homme et ces violations des libertés civiles doivent être vigoureusement dénoncées et condamnées, en particulier à l'approche des élections. En effet, des élections démocratiques sont tout simplement impossibles si les libertés d'expression, d'association, de presse, etc. ne sont pas respectées. Le Parlement européen ne s'y est pas trompé en votant le 6 octobre 2016 une résolution concernant le Rwanda et qui "condamne tout acte d'intimidation, arrestations, détentions et poursuites" d'individus "uniquement parce qu'ils ont exprimé leurs opinions". Les députés européens demandent dès lors au Rwanda d'assurer une élection présidentielle en 2017 "crédible et transparente", en respectant les fondements de la démocratie et en améliorant son bilan en matière de droits de l'homme. Cette résolution revient aussi de manière détaillée sur le cas particulier de Victoire Ingabire, cette opposante condamnée en appel, en 2013, à 15 ans de prison notamment pour "minimisation du génocide" et "conspiration contre les autorités par le terrorisme et la guerre". Le Parlement européen demande ainsi la révision "rapide et impartiale" du procès de madame Ingabire, estimant sans détours que ce procès n'a nullement été "conforme aux normes internationales" et que les droits de la défense ont été bafoués. Le Parlement européen souligne aussi la détérioration des conditions de détention de madame Ingabire. Enfin, les députés européens demandent au gouvernement rwandais de revenir sur sa décision de se retirer de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. Cette décision avait été prise en mars 2016, soit quelques jours à peine avant l'audience de l'appel interjeté par madame Ingabire. 1. Au vu de ces évolutions inquiétantes et des atteintes aux droits de l'homme ainsi constatées, quelle est aujourd'hui la position du gouvernement belge à l'égard des autorités rwandaises? 2. Quelles sont les actions que vous comptez entreprendre auprès du président Kagamé et du gouvernement rwandais pour rappeler l'importance du respect des libertés de base en vue de l'organisation d'élections réellement démocratiques? 3. Soutenez-vous les diverses demandes exprimées dans leur résolution par les parlementaires européens? 4. Dans le cas particulier de madame Ingabire, la Belgique réclame-t-elle aussi la révision de son procès? 5. En mars 2016, vous aviez indiqué que la Belgique "suivait de près" ce dossier et que vous envisagiez positivement l'audience qui était alors prévue à la Cour africaine. Qu'en est-il aujourd'hui, alors que le Rwanda s'est retiré de cette Cour précisément pour bloquer de la sorte l'appel de madame Ingabire? |
Statut | 1 réponse normale - normaal antwoord |
Publication réponse |
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Date publication | 03/03/2017, 20162017 |
Réponse |
Notre pays suit de près la situation politique au Rwanda et la préparation des élections présidentielles de cet été. On sait que les périodes électorales au Rwanda ont par le passé conduit à des atteintes aux droits d'acteurs politiques et il convient de rester vigilant. La manière dont se déroulera le scrutin est donc particulièrement importante. La Belgique insiste donc auprès de l'UE pour accorder une attention particulière à deux éléments; le premier est la liberté d'expression et des médias, le second la définition d'un cadre législatif clair et transparent en vue de la tenue d'élections. La loi électorale est actuellement toujours en cours de révision. Ces points ont été abordés par les ambassadeurs européens lors du dialogue Article 8 qui a eu lieu le 20 janvier 2017 à Kigali en présence, notamment, de la ministre des Affaires étrangères Louise Mushikiwabo, qui menait le dialogue, et de Johnston Busingye, ministre de la Justice. Dans les mois à venir, ces messages seront également communiqués lors de rencontres, de démarches, dans des communiqués, etc. Sur le terrain, en l'absence d'une mission d'observation électorale européenne, BE a proposé l'envoi d'une mission d'experts de l'UE et appuie, le cas échéant, un soutien européen à une initiative d'observation des élections par la société civile. La Belgique a suivi de près le procès de madame Ingabire au Rwanda en première instance et en appel, de concert avec nos partenaires européens. Le procès en première instance de madame Ingabire a, dans un premier temps, été entaché d'irrégularités mais la procédure en appel a été plus respectueuse des droits de la défense. Cependant, une série de questions méritent d'être examinées. C'est dans ce contexte que le dossier de madame Ingabire est actuellement traité par la Cour africaine des Droits de l'Homme et des Peuples . Les Cours des Droits de l'Homme régionales sont un élément clé du dispositif des droits de l'homme. La Belgique accorde énormément d'importance à cette question, également en tant que membre du Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU. Pour rappel, le Rwanda était revenu sur la déclaration permettant à des individus et à des ONG de présenter des cas devant la Cour sans passer par la Commission de l'Union africaine. Mais le 3 juin 2016, la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples s'est prononcée sur le fait que la République du Rwanda a le droit de retirer sa déclaration et que le retrait devrait prendre effet à partir du 1er mars 2017, un an après la date du dépôt de l'instrument de retrait devant la Commission de l'Union africaine. La Cour a toutefois décidé, à l'unanimité, que le retrait n'a pas d'impact sur la procédure de l'affaire Ingabiré. La prochaine audience devrait avoir lieu le 17 mars 2017. Notre pays continuera à suivre cette affaire. En ce qui concerne la résolution du Parlement européen, il s'agit d'un signal important qui a d'ailleurs suscité de fortes réactions de la part des autorités rwandaises. Il revient en premier lieu à la Haute Représentante F. Mogherini d'indiquer dans quelle mesure les recommandations seront suivies d'effets. |
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