Question et réponse écrite n° : 0012 - Législature : 55
Auteur | Daniel Senesael, PS (06682) |
Département | Ministre du Climat, de l'Environnement, du Développement durable et du Green Deal |
Sous-département | Climat, Environ, Dévelop durable, Green Deal |
Titre | La hausse des émissions mondiales de méthane. |
Date de dépôt | 12/11/2020 |
Langue | F |
Statut question | Réponses reçues |
Date de délai | 17/12/2020 |
Question |
Une étude publiée récemment par l'organisation Global Carbon Project révèle que les émissions de méthane à l'échelle mondiale ont augmenté de manière significative ces dernières années. Ainsi, la production de méthane a progressé de 9 % entre 2006 et 2017 à l'échelle globale. Le rejet de méthane dans l'atmosphère favorise grandement le phénomène de réchauffement climatique, à hauteur de 23 % actuellement. L'effet de réchauffement du méthane a été estimé à 28 fois supérieur par kilogramme à celui du CO2 sur une durée de 100 ans. Selon cette étude, les émissions de méthane dues à l'activité humaine proviennent principalement du domaine de l'agriculture, de l'exploitation de sources d'énergie fossile (extraction et/ou utilisation du pétrole, du gaz, du charbon), de la gestion des déchets solides et liquides (fermentation des déchets, eaux usées, sites d'enfouissement, notamment), des feux de biomasse et de biofuel et, enfin, des transports et de l'industrie. Les chiffres relatifs à l'augmentation des émissions mondiales de méthane correspondent, selon les chercheurs du Global Carbon Project, à des scénarios climatologiques de fort réchauffement, caractérisés par un réchauffement global de 3 à 4°C en 2100 - soit une température moyenne dépassant largement les ambitions fixées par l'accord de Paris. 1. Avez-vous eu connaissance de l'étude du Global Carbon Project? Pouvons-nous avoir votre retour sur la problématique évoquée? 2. Pouvez-vous indiquer des chiffres relatifs aux émissions et aux concentrations de méthane en Belgique ces dernières années? 3. Si la banque mondiale des données pointe une baisse tendancielle des émissions de méthane en Belgique depuis les années 1970 (14215,9 kt d'équivalent CO2 contre 9243, 349 en 2012) et si, selon le Global Carbon Project, la majorité des émissions de méthane proviennent de régions tropicales ou de pays comme la Chine, la Belgique est néanmoins concernée par la problématique du réchauffement climatique dû aux émissions de méthane via, notamment, ses importations de sources d'énergie fossiles. Pouvons-nous avoir votre retour sur ce point? |
Statut | 1 réponse normale - normaal antwoord - Réponse publiée |
Publication réponse |
![]() |
Date publication | 16/12/2020, 20202021 |
Réponse |
L'étude du Global Carbon Project fournit une nouvelle estimation des émissions mondiales de méthane, réalisée à partir de méthodes bottom-up (à partir des sources d'émissions) et top-down (par des mesures dans l'atmosphère). Cette étude a eu un retentissement important dans le monde académique et institutionnel. Le gouvernement et l'administration ont bien pris connaissance de ces travaux importants. L'estimation du budget méthane est une tâche complexe, du fait de la multiplicité des sources anthropiques et des émissions naturelles provenant notamment des terres humides et des eaux intérieures. L'étude souligne que les émissions et concentrations atmosphériques de méthane continuent d'augmenter. Le méthane est actuellement le deuxième gaz d'origine anthropique responsable du réchauffement climatique à l'échelle mondiale. Il a un potentiel de réchauffement global plus élevé que celui du CO2 mais avec une durée de vie plus courte dans l'atmosphère. Ces émissions représentent donc un enjeu considérable par rapport aux ambitions de neutralité climatique à l'horizon 2050, et leur estimation précise est dès lors très importante pour orienter la politique climatique. Ces données pourront notamment contribuer au premier bilan mondial de la mise en oeuvre de l'Accord de Paris, prévu en 2023. En Belgique, les émissions de méthane représentent 6,6 % (2018: 7,85 Mt éq. CO2) des émissions totales hors secteur LULUCF (émissions et absorptions par les sols et les forêts). Elles ont fortement chuté depuis le début du monitoring de ces émissions: de -36 % en 2018 par rapport à 1990. On s'attend d'après les projections à ce que cette diminution se poursuive: en 2030, elles devraient se situer à - 46 % (soit 6,60 Mt éq. CO2) par rapport à 1990 dans un scénario à politique inchangée, et atteindre -52 % (5,85 Mt éq. CO2) pour le scénario "avec politiques additionnelles". Les émissions de méthane se répartissent en Belgique entre trois secteurs principaux: agriculture (1990: 54,9 %; 2018: 74,1 %), déchets (1990: 31,9 %; 2018: 12,3 %) et énergie (1990: 13,1 %; 2018: 13,3 %). Les diminutions les plus spectaculaires concernent le secteur des déchets: -75 % depuis 1990 (2018) et jusqu'à -90 % attendu pour 2030. Il s'agit essentiellement des postes "élimination des déchets solides", c'est-à-dire la mise en décharge et du "traitement et rejet des eaux usées". Les très fortes diminutions des émissions des décharges font suite aux efforts en réutilisation, recyclage, compostage et incinération (récupération des biogaz à la torchère pour récupérer leur contenu énergétique). La part relative de l'agriculture continue de s'accroitre et devrait en 2030 constituer 75 à 80 % des émissions de méthane. Les émissions de méthane du secteur agricole proviennent essentiellement des sols agricoles (80,6 % en 1990 et 78,4 % en 2018) et pour le reste de la gestion des lisiers/fumiers. Le potentiel de réduction des émissions de méthane de l'agriculture est très limité au niveau technique (20 % de diminution potentielle en adoptant des techniques telles qu'une couverture permanente des sols, une valorisation et un traitement des fumiers, des sélections d'animaux moins émetteurs). Le principal potentiel de réduction (80 %) repose sur une transition vers des modes d'élevage plus respectueux de l'environnement, du climat et du bien-être animal. Les systèmes d'élevage extensif en pâture en sont un exemple. Cela implique de toutes façons une réduction importante de la production et de la consommation de viande "rouge" (bovine) et de produits laitiers (avec des cobénéfices importants pour la santé). Dans le secteur de l'énergie, la principale source de méthane provient des émissions fugitives des combustibles (72,0 % en 1990 versus 51,5 % en 2018), puis du secteur des bâtiments résidentiels (14,6 % en 1990 versus 25,4 % en 2018). En 1990, on trouvait aussi une certaine part pour le transport, mais qui a fortement régressé depuis (8,8 % en 1990 versus 1,7 % en 2018). Si les émissions diminuent en Belgique, elles augmentent globalement et l'Europe (ainsi que la Belgique) importe une partie non-négligeable de celles-ci dans les commodités. Bien que la comptabilisation des émissions, dans le système de rapportage international (UNFCCC), soit basée sur la territorialité (les émissions sont comptabilisées là où elles sont produites), la recherche de solutions pour diminuer les émissions de méthane doit donc dépasser nos frontières nationales. Comme souligné dans la Stratégie Méthane proposée par la Commission Européenne en novembre 2020, l'Europe est le plus grand importateur d'énergies fossiles au monde et peut donc grandement contribuer à la réduction des émissions de méthane, notamment en substituant les énergies renouvelables à ces énergies fossiles. Dans le domaine des commodités agricoles, l'Union Européenne réfléchit notamment à la mise en place de mesures pour éviter l'importation de produits associés à la déforestation (tels que l'huile de palme, la viande de boeuf, le cuir, etc.) (Initiative free-deforestation-commodity-supply chain prévue pour le printemps 2021). |
Desc. Eurovoc principal | POLITIQUE DE L'ENVIRONNEMENT |
Descripteurs Eurovoc | HYDROCARBURE | POLITIQUE DE L'ENVIRONNEMENT | POLLUTION ATMOSPHERIQUE |